Aéronautique / Entreprise

2018, une grande année pour l’aéronautique française

 

Un chiffre d’affaires de 65,4 milliards d’euros et un besoin toujours plus important en matière de profils qualifiés : le bilan de l’année 2018 que vient de rendre public le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) démontre une nouvelle fois la bonne santé de l’aéronautique française. Alors que le secteur espère pouvoir enregistrer près de 15 000 embauches en 2019, notamment chez les ingénieurs, Francis Pollet, le directeur général de l’IPSA, décrypte les contours de cette bonne nouvelle pour les futurs professionnels formés par l’école de l’air et de l’espace.


Francis Pollet


Quel bilan tirer, justement, de cette année 2018 vue par le Gifas ?

Francis Pollet : Nous pouvons déjà dire que 2018 a bel et bien été une année solide, ne serait-ce que pour les chiffres présentés. Oui, le chiffre d’affaires est important, mais ce qui l’est également, c’est sa progression de 1,2 % par rapport à l’an passé. Forcément, une telle activité implique est annonciateur d’une année 2019 qui sera marquée par un effort vers le recrutement et vers l’Europe. L’activité dans le civil est en hausse à 50,4 milliards d’euros, marquée par les livraisons record de 800 Airbus.

La filière Défense est quant à elle stable à 15 milliards d’euros. Enfin, pour le spatial, cette année va aussi être une année charnière, comme l’indique Eric Trappier qui, en plus d’être président du Gifas et PDG de Dassault Aviation, occupe également les postes de président de l’European Aerospace and Defence Industries Association (ASD) et du Conseil des Industries de Défense Françaises (CIDEF). Il faut rappeler que la filière spatiale française représente pas moins de 53 % du chiffre d’affaires de l’industrie spatiale européenne, avec 4, 62 milliards d’euros en 2017.

 

Comment va se traduire ce fort besoin de main d’œuvre et d’ingénieurs qualifiés ?

Francis Pollet : Eric Trappier l’explique très bien en disant que cette industrie « continue à créer de l’emploi, et ce, dans toute la France » tout en précisant que « la difficulté de recrutement est nette et touche aussi bien les grands groupes que les plus petites entreprises. » Alors oui, au cours de l’année 2018, près de 15 000 recrutements ont été réalisés et 4 000 emplois nets ont été créés, ce qui représente un nombre d’emplois en augmentation de 2 %. Mais la bonne santé du secteur ne signifie pas pour autant que tous les talents vont spontanément vouloir le rejoindre.

Aujourd’hui en France, malgré le dynamisme actuel, certaines PME ne livrent pas à cause du manque d’effectif ! Il y a donc un réel besoin, avec de 15 000 postes à pourvoir. Là-encore, le constat d’Eric Trappier est juste : les acteurs de l’aéronautique comme l’aérospatiale ont du mal à recruter des ingénieurs et les vraies difficultés se situent au sein des régions. Pour trouver une solution à ce problème, je partage le point de vue de Christophe Cador, le président du comité Aéro-PME du Gifas. Pour lui, les entreprises doivent redoubler d’efforts « pour convaincre les jeunes » et leur montrer qu’il y a « de belles évolutions possibles au sein de la filière avec le développement des technologies et des opportunités internationales ».

L’IPSA sera d’ailleurs une nouvelle fois au Salon International de l’Aéronautique et de l’Espace Paris Bourget (SIAE) du 17 au 23 juin 2019 pour présenter ses formations en ce sens, tout comme le Gifas qui en profitera pour sensibiliser les jeunes à ces opportunités de carrières passionnantes. Et nous profiterons de notre présence au Bourget pour présenter la nouvelle version de l’Observatoire des métiers de l’air et de l’espace de l’IPSA réalisé en partenariat avec l’IPSOS : la première édition de ce travail avait été présentée en 2017 et laissait entrevoir les tendances justement confirmées par le bilan du Gifas cette année.



Même si le bilan du Gifas valorise la performance des grands groupes du secteur, il n’oublie également pas de souligner le rôle que jouent des structures plus petites dans ce dynamisme. Les uns ne vont pas sans les autres ?

Francis Pollet : C’est la réalité et la compétitivité doit également faire l’objet d’une attention particulière. Comme le dit Eric Trappier, il faut « faire monter en valeur le tissu des petites entreprises qui alimentent la technologie et les grandes entreprises ». De fait, l’investissement dans de nouvelles compétences fait partie des priorités pour 2019.

C’est pour cette raison que le Gifas n’a pas hésité à lancer le programme Ambition PME/ETI : le chiffre d’affaires des équipementiers et des PME représente 24 milliards d’euros. Un autre projet ambitieux, celui de l’Industrie du futur, sera aussi lancé lors de la 53e édition du Bourget en juin prochain pour justement aider ces entités à avancer dans leur transformation numérique. Il s’agit d’une étape très importante pour l’avenir et la pérennité du secteur.

 

Quelle place occupe l’Europe dans ce bilan ?

Francis Pollet : La capacité du Vieux Continent à faire bloc est un enjeu crucial. En effet, face à la Chine et aux États-Unis, nous devons favoriser les équipements européens et non une autonomie stratégique. Le bilan du Gifas ne dit pas autre chose et préconise le fait que l’Europe achète d’abord aux Européens. À raison : une Europe forte permet de soutenir d’autant plus la recherche et le développement.

 

Quid de la filière spatiale ?

Francis Pollet : Plus que jamais, cette dernière a besoin d’un soutien européen alors qu’elle se prépare au premier lancement d’Ariane 6 en 2020. Actuellement, la filière fait face à une baisse des commandes sur le marché mondial des satellites de télécommunication en orbite géostationnaire et à des difficultés pour maintenir ses parts de marché actuellement de 30 %. Ce soutien est donc très important car l’Europe doit continuer à rester une place forte dans ce domaine.